Portrait d'Inès Pactat avec des objets en verre.
Ludovic Godard
Auteur 
Catherine Tondu

Les fragments de l'histoire du verre s'assemblent peu à peu

Inès Pactat, doctorante au laboratoire chrono-environnement et à la Maison des sciences de l'homme et de l'environnement, s'intéresse à l'archéologie du verre.

Si en Europe occidentale on ne commence à produire ce matériau qu’au VIIIe siècle, en Mésopotamie on maîtrise la fabrication du verre dès le troisième millénaire avant J.-C.

Les verres au natron d’Égypte et de la côte syro-palestinienne sont réputés pour leur grande pureté et leur résistance. Le mélange de sable et de ce minéral sodique est mis en fusion puis débité en lingots exportés vers l’Europe, où ils sont refondus pour être travaillés par les artisans verriers. C’est au haut Moyen Âge que s’opère le grand bouleversement de l’industrie du verre. Ressources insuffisantes en natron ? Crises politiques décourageant les échanges ? Si les explications sont hypothétiques, il est certain que les VIIe et VIIIe siècles voient s’intensifier le recyclage, une pratique courante depuis l’Antiquité, et que la fabrication des premiers verres aux cendres végétales est attestée en Europe peu après cette période.

Cette mutation importante de la production d’un matériau qui ne l’est pas moins reste en réalité peu connue. Elle constitue un axe majeur des recherches menées par Inès Pactat, doctorante en archéologie à la MSHE Claude Nicolas Ledoux. « L’archéologie du verre ne se développe que depuis une trentaine d’années en France, et le Moyen Âge reste peu étudié malgré son intérêt. » Le travail de la jeune archéologue montre comment les artisans ont amélioré leurs techniques, faisant par exemple passer la température de fusion de la silice de 1 700 à 1 100 °C en ajoutant de la potasse à leur recette, qu’ils utilisaient des oxydes métalliques ou jouaient sur la cuisson du verre pour le colorer, ou encore comment l’accès à l’autonomie des verriers en Europe a conditionné et modifié l’organisation de tout un pan de l’artisanat.

« Pendant l’Antiquité, quand le verre n’est que refondu, pour en tirer de la vaisselle, des vitrages ou des perles, l’artisan se rapproche du consommateur et installe son échoppe en ville ; quand il s’agit d’en assurer la fabrication, le verrier se rapproche des matières premières et se fixe en général à proximité d’une forêt. »

Étude de la composition des verres, des objets manufacturés, des déchets de fabrication, et au-delà du contexte historique, des échanges commerciaux et des relations politiques… La quête d’Inès Pactat s’étend de l’Orient à l’Occident et du VIIIe au XIe siècle, sur les traces d’une activité et d’un matériau des plus passionnants.

Article paru dans le numéro 267 de novembre 2016 du journal en Direct.

Contact

Maison des sciences de l'homme et de l'environnement (MSHE) Claude Nicolas Ledoux

Une vase en verre
Morceaux de mosaïque
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