Modernité des hétérotopies : genre, discours, création - Rethinking Heterotopia

8 Juin 2021 - 10 Juin 2021

Colloque international organisé par l'université de Franche-Comté (Centre de Recherches Interdisciplinaires et Transculturelles de l'UFR SLHS) et l'Université de Split (Croatie), sous l'égide de Nella Arambasin et Margaret Gillespie.

heterotopie
Jacky Frossard

Dans le cadre de ce que l’on nomme depuis une trentaine d’années le « tournant spatial » (spatial turn), un concept foucaldien en particulier mériterait d’être retenu, l’hétérotopie, pour avoir fait ses preuves à la fois dans l’histoire des sciences où il a été employé avec rigueur comme « puissance explicative » (Lamy 2019 : 127), et en sciences humaines et sociales, à partir desquelles il s’étend aujourd’hui aux arts visuels. Pour reprendre la définition de Foucault, il s’agit : "des lieux réels, des lieux effectifs, des lieux qui ont dessinés dans l’institution même de la société, et qui sont des sortes de contre-emplacements, sortes d’utopies effectivement réalisées dans lesquelles les emplacements réels, tous les autres emplacements réels que l’on peut trouver à l’intérieur de la culture sont à la fois représentés, contestés et inversés, des sortes de lieux qui sont hors de tous les lieux, bien que pourtant ils soient effectivement localisables".

Nombreux sont ces contre-emplacements signalés par Foucault : en guise de passages, il y a les rue, train, café, cinéma, plage, maison, chambre et lit ; mais aussi les théâtre, jardin et tapis où se juxtaposent « en un seul lieu plusieurs espaces ». Interroger aujourd’hui les “utopies effectivement réalisées”, permet de se rappeler que l’expérience urbaine d’espaces alternatifs dans les années 1960, mena le théoricien du Situationnisme, Guy Debord, à prôner des stratégies indissociablement discursives et politiques : la “dérive” d’une part, qui exclut l’immobilité pour développer dans l’espace la perception d’un mouvement non-structuré permanent, et d’autre part le “détournement”, qui suppose le re-cyclage ou re-positionnement de notions et perceptions spatiales ainsi renouvelées (Andreotti & Costa 1996).

Couplés au « découpages du temps », les contre-emplacements deviennent des hétérochronies, à savoir des cimetières, musées et bibliothèques qui visent à « enfermer dans un lieu tous les temps », un « hors du temps » que rejoignent d’une manière non plus « perpétuelle » mais « chronique » les fêtes, foires et villages de vacances (ou Dreamlands), sans compter les  maisons closes  et certaines colonies réglées à la perfection, qui avaient eu une fonction de « compensation ». Cependant, pour ne pas tomber dans une liste à la Prévert, le philosophe avait conscience déjà de la nécessaire description de « l’ensemble des relations qui définissent ces emplacements » ; ce qui, cinquante ans plus tard, nous amène à les reconfigurer suivant trois paramètres : du genre, du discours et de la création.

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Salon Préclin