Les vulnérabilités liées à la santé

Depuis les années 1980, le concept de vulnérabilité marque l'aboutissement d'une réflexion sur les différentes manières dont l'autonomie est déniée et sur les justes manières d’accompagner et prendre soin des personnes dans ces situations. Paradoxalement, cette vulnérabilité peut être engendrée par la médecine suite à un acte ou un diagnostic médical.

Pourtant elle ne se réduit pas à un événement indésirable qui signale un dysfonctionnement considéré comme une externalité négative de notre système de santé (ARS, 2016). Elle constitue plutôt une conséquence probable ou un impact significatif à internaliser, qui dépend paradoxalement des progrès scientifiques et techniques. Plus les capacités d’intervention se multiplient, plus le système de soin génèrent des situations de vulnérabilité liée à la santé.

En ce sens, les vulnérabilités liées à la santé ne concernent pas seulement des cas individuels, mais recouvrent une dimension systémique et induisent une responsabilité sociale face aux personnes qui se trouvent dans des situations vulnérables à cause des progrès en santé.

Plusieurs exemples permettent de prendre la mesure de cet angle mort de notre système de santé : du côté des patients, les personnes en fin de vie ou souffrant de maladies chronicisées, ou encore les personnes bénéficiant d’un séquençage génomique peuvent expérimenter simultanément les bénéfices des progrès médicaux et la vulnérabilité associée. Du côté des soignants, les situations de vulnérabilité induisent des formes de souffrance au travail. Souvent associées à des crises conjoncturelles, elles relèvent plus fondamentalement des structures mêmes du système de soin et des progrès bio-scientifiques et bio-technologiques. De nombreux travaux sur les données massives font émerger aussi de nouvelles formes de vulnérabilités (des patients, des soignants ou des institutions de soins) justement liées à la digitalisation de la santé.

Comprendre ces vulnérabilités liées à la santé ne consiste donc pas à identifier des déterminants sociaux de santé mais plutôt à retracer les conséquences corrélées aux progrès de la médecine pour reconnaître la complexité des trajectoires médicales selon une approche multimodale et pluridisciplinaire.