Sur la trace des moulages antiques
Exhumés des greniers de l’université où ils dormaient depuis plusieurs décennies, des moulages en plâtre à vocation pédagogique, datant de la fin du XIXe siècle, reprennent vie grâce à la volonté et au travail de Sophie Montel, et d’étudiants comme elle passionnés par cette trouvaille.
Sophie Montel est enseignante en histoire de l’art et archéologie du monde grec à l’université de Franche-Comté, et chercheuse à l’ISTA. « Pourquoi ces moulages de chefs d’œuvres antiques, alors qu’il n’existait pas de chaire d’enseignement ni en histoire de l’art, ni en archéologie, à cette époque à Besançon ?… » Cette découverte est l’occasion, outre l’intérêt propre que représente la collection, de retrouver les traces de ces formations, dont il n’existe que peu d’indices avant les années 1970.
La quête démarre avec la lecture du seul ouvrage consacré à l’histoire de l’université de Besançon à la fin du XIXe siècle, période marquant l’usage de ces supports d’enseignement. Elle se poursuit jusqu’à la consultation des dossiers des professeurs identifiés dans ce livre comme ayant inscrit l’histoire de l’art à leurs programmes : Eugène Nageotte et Edouard Sayous, spécialistes respectivement de littérature ancienne et d’histoire du Moyen Âge, ont visiblement fait opérer à leurs étudiants quelques incursions dans l’art de l’Antiquité et de la Renaissance. Ce sont très certainement eux qui ont commandité l’achat des fameux moulages, reproduisant pour l’essentiel des reliefs décorant temples et monuments antiques. Les archives départementales ont conservé intactes les preuves manuscrites de ces achats effectués en 1889 et 1892, depuis les bons de commande jusqu’aux avis de recommandations de livraison. Sur les soixante-trois moulages figurant à l’inventaire d’achat, seuls six ont survécu au passage du temps. Ils ont fait l’objet d’une restauration par le Centre régional de restauration et de conservation des œuvres d’art avant d’être exposés à la bibliothèque de lettres.
Les supports pédagogiques en plâtre se sont complétés, dans les mêmes années et jusqu’au début du XXe siècle, de photographies argentiques et sur plaques en verre, prises dans les musées. Cent soixante-huit spécimens, productions de la maison Giraudon à Paris, contrecollés sur carton afin de circuler parmi les étudiants, ont été retrouvés à Besançon, sur quelque mille cent photographies que l’enquête a révélé avoir été achetées par l’université. Plusieurs centaines de plaques en verre sont conservées, encore en cours d’inventaire.
La recherche guidée par Sophie Montel prend aujourd’hui une dimension régionale, avec des investigations sur Dijon, Belfort ou Vesoul, où divers lieux d’enseignement, universités, écoles d’art ou ateliers ont conservé des collections de même nature.
Comme une étape jalonnant ce parcours, une exposition lui sera consacrée du 23 mars au 20 mai 2018 au Gymnase-espace culturel de Besançon, sous le titre « Cas d’écoles ».
Article paru dans le journal en direct numéro 275 de mars-avril 2018.