Frédéric LAMBERT, Christine SERVAIS, Véronique SERVAIS
Il ne s’agit pas de soigner la maladie elle-même, mais d’améliorer la qualité de vie des patients atteints de la maladie d’Alzheimer, et par ricochet de celle des proches et aidants qui les accompagnent, ce qui est remarquablement précieux. Deux techniques de stimulation transcrânienne sont employées à cette fin, pour l’instant exclusivement dans le cadre d’études cliniques : la tDCS1, qui utilise un courant électrique de basse intensité, et la rTMS², exploitant un champ magnétique. Le recours à ces techniques trouve son origine dans le traitement des dépressions sévères, pour lesquelles elles représentent une alternative aux solutions médicamenteuses parfois peu efficientes, voire inefficaces pour certains patients.
Agissant sur l’activité et la connexion des neurones, dont le dérèglement s’avère responsable de pathologies et de dysfonctionnements, les techniques de stimulation transcrâniennes montrent aussi des effets bénéfiques dans le traitement des suites d’un AVC, de la fibromyalgie, ou dans la lutte contre les addictions comme le tabagisme. Elles interviennent aujourd’hui également dans la prise en charge thérapeutique de la maladie d’Alzheimer. Autant de champs d’intervention gérés au laboratoire de neurosciences intégratives et cliniques de l’université de Franche-Comté, et toujours à l’intérieur de protocoles de recherche.
« Nous menons actuellement une étude clinique auprès de cinquante-deux patients atteints de la maladie d’Alzheimer, raconte le Pr Pierre Vandel, chercheur en neurosciences et responsable du service de psychiatrie adulte au CHU de Besançon. S’il est encore prématuré d’annoncer des résultats définitifs, nous pouvons remarquer chez les patients une amélioration certaine du dynamisme, de la motivation, de la capacité à participer à des activités ou à une discussion, et de manière générale du comportement. Parallèlement, l’anxiété et les troubles de l’humeur diminuent. Ces évolutions positives sont confirmées par les témoignages des proches et des soignants. »
Dépression et rTMS
Identifiée comme piste thérapeutique possible dès la fin des années 1960, mais délaissée au profit des traitements médicamenteux émergeant alors, la stimulation magnétique transcrânienne connaît un regain d’intérêt depuis une dizaine d’années, depuis que ces mêmes médicaments ont montré leurs limites : de nombreux patients souffrant d’un épisode dépressif majeur ne répondent en effet pas de façon satisfaisante aux traitements par antidépresseurs.
Le Pr Emmanuel Haffen et son équipe, du laboratoire de neurosciences intégratives et cliniques, ont récemment publié les résultats d’une recherche portant sur les effets de la tDCS sur 24 patients souffrant d’une telle pathologie. L’étude DepReSCo fait état d’une « amélioration de la symptomatologie dépressive des patients ayant reçu le traitement actif, comparativement aux patients ayant reçu un placebo, quatre semaines après la fin des séances de tDCS ». Pour confirmer ces premiers résultats, l’étude STICODEP prend le relais sur sept centres en France et inclura à terme cent vingt patients. Elle évaluera les effets du traitement par tDCS sur six mois, et ajoutera l’étude de son impact sur les fonctions cognitives à celle de son influence sur les troubles de l’humeur. L’intérêt de développer les traitements par tDCS réside dans le fait qu’ils sont relativement peu coûteux, reposent sur un appareillage peu encombrant et facile à transporter, quand la technique rTMS, qui fait ses preuves depuis de nombreuses années, suppose des installations d’envergure et onéreuses.
À noter que sur les quarante centres français disposant d’un tel équipement, Besançon est l’un des seuls à posséder un dispositif robotique permettant de guider l’impulsion magnétique au plus près de la zone corticale à traiter, grâce à une reconstruction 3D du cerveau par IRM. Cet équipement, représentant un investissement de 200 000 €, a été financé en intégralité par la Région Franche-Comté en 2011.