Mécaniciennes
Elles sont venues de loin pour étudier la mécanique à Besançon. Le master MEETING, filière traditionnellement masculine, n’a jamais accueilli autant de filles que cette année.
Dans le trombinoscope réalisé à la rentrée 2012 par les enseignants du master Mécanique et ingénieries1, on compte cinq visages féminins : un record dans une filière qui accueille habituellement tout au plus une ou deux filles. Parmi ces étudiantes, une seule est franc-comtoise, les autres viennent toutes d’autres continents.
Yasmina Louchene est originaire de Belfort. Elle a fait deux premières années de médecine avant de se réorienter en licence Sciences pour l’ingénieur. « Comme j’étais plutôt matheuse, cela me convenait et je m’étais renseignée sur les débouchés. Au départ, je n’envisageais pas de faire des études longues dans cette filière, mais je m’y suis plu et j’ai continué en master. L’ambiance était très sympa, on travaillait beaucoup en groupe. Même si j’étais la seule fille, j’ai été très bien accueillie» raconte-t-elle. « Les gens sont souvent surpris quand je dis que je fais de la mécanique mais dès qu’on discute un peu, les clichés disparaissent ». Sa matière préférée : la conception assistée par ordinateur (CAO). « Pourtant, en licence je n’étais pas très douée mais je me suis entraînée depuis à l’utilisation des logiciels. J’aime l’idée de réaliser des choses concrètes. » Après son master, elle aimerait travailler dans une entreprise du secteur biomédical pour y faire de la conception mécanique. Un métier qui, finalement, concilierait ses centres d’intérêt passés et actuels.
Il faut bien que quelqu’un ouvre la voie !
Jessica Morai Finardi est brésilienne. Elle est venue de l’université d’Uberlandia, pour un an, dans le cadre du programme d’échanges « sciences sans frontières ». La mécanique, elle connaît, puisque son père travaille dans ce secteur, mais c’est surtout son intérêt pour les mathématiques et, plus généralement, les matières scientifiques, qui l’ont poussée vers ce choix de filière. « Au lycée, je voulais devenir ingénieur. J’ai choisi la mécanique parmi les différentes disciplines possibles parce qu’elle touche à beaucoup de domaines : logiciels, calculs, machines, automobiles… autant de secteurs où je pourrais potentiellement trouver du travail » explique-t-elle. Au Brésil comme en France, la mécanique est plutôt une affaire d’hommes et Jessica s’en est d’abord inquiétée. « Quand j’ai vu que certaines femmes occupaient de bons postes dans ce secteur, cela m’a rassurée. Et puis il faut bien que quelqu’un ouvre la voie ! ». A l’UFC, elle a approfondi ses connaissances en simulation numérique. C’est le domaine dans lequel elle souhaiterait se spécialiser, en tant qu’ingénieur une fois son cursus terminé au Brésil.
Lili Zhao est arrivée à Besançon en 2007. Cette fille de commerçants chinois de la région de Guang Xi a voulu découvrir un autre mode de vie et choisi la France parce que les études supérieures y étaient financièrement abordables. C’est le CLA, réputé pour ses formations en langues, qui l’a conduite à Besançon. « Cette ville est très bien pour étudier tandis qu’à Paris, il y a trop de monde » affirme-t-elle. Elle a eu, au départ, beaucoup de difficultés avec la langue, en particulier lors de sa première année passée à l’IUT en Génie mécanique et productique. « Je passais deux heures tous les soirs à essayer de comprendre le vocabulaire, parfois avec l’aide d’un enseignant » avoue-t-elle. En mathématiques et en physique, pas de problèmes de compréhension, au contraire. C’est l’une des raisons de son choix : « La mécanique, pour moi, c’était le plus facile. J’aime le calcul. Et puis cela permet de comprendre les phénomènes physiques ». Une fois son master en poche, elle compte rentrer en Chine pour y chercher du travail et, pourquoi-pas, devenir elle-même enseignante dans une université technique.
Ne rien s’interdire sous prétexte qu’on est une fille
Dior Diouf est originaire de Dakar. Elle est arrivée à Besançon juste après le bac. Après avoir hésité à poursuivre ses études dans le domaine des télécommunications, elle a finalement choisi un secteur moins développé au Sénégal : la mécanique. « Là-bas comme ici, quand je dis ce que je fais, on pense d’abord que je travaille dans un garage ! » constate-t-elle. Dans la nombreuse fratrie dont elle est issue, elle a l’image de celle « qui ne fait jamais rien comme les autres ». Elle bénéficie cependant du soutien inconditionnel de sa famille. Elle qui a étudié dans un collège de filles de Dakar a bien retenu le précepte inculqué par les enseignantes : « Ne rien s’interdire, en termes d’études ou de carrière, sous prétexte qu’on est une fille ». Cette jeune femme déterminée a en effet de nombreux projets en tête. Après avoir travaillé quelques années en France ou en Suisse, pour se forger une expérience, elle compte retourner au Sénégal pour, éventuellement, y monter sa propre entreprise. « Beaucoup de gens là-bas seraient ravis d’avoir du travail » explique-t-elle. Ce n’est qu’une idée parmi d’autres « j’aimerais aussi donner aux étudiants sur place l’occasion d’étudier la mécanique » avoue-t-elle.
Imane Beriane est marocaine. Après sa licence obtenue à Casablanca, elle a passé un an à l’UTBM1, dans un cursus d’ingénieur en énergétique qui a malheureusement fermé. Elle s’est alors inscrite à l’UFC. « Je me suis dit qu’en étudiant la mécanique, je pourrais toujours travailler dans le secteur de l’énergie alors que l’inverse n’est pas vrai ». Un choix qu’elle ne regrette pas, car elle y retrouve son intérêt pour l’informatique en plus d’aspects expérimentaux et concrets qui lui plaisent. « En plus, l’ambiance est bonne ici. Il n’y a pas de racisme ni de discrimination envers les filles» ajoute-t-elle. Imane envisage de poursuivre ses études par une thèse de doctorat avant d’aller travailler, en tant qu’ingénieur, dans le secteur de l’aéronautique ou de l’énergie. D’abord quelques années en France puis, sans doute, au Maroc.
Si la mécanique a séduit ces jeunes femmes intéressées par les sciences, souvent pour la multiplicité de ses aspects et de ses domaines d’application, elle pourrait bien en convaincre d’autres. Avis aux amatrices.
- Le master Mécanique et ingénieries est aussi connu sous le nom de master MEETING
- Université de Technologie Belfort-Montbéliard
Contact
Cécile Berriet
Responsable de la première année de master MEETING
cberriet@univ-fcomte.fr
Nourredine Bouhaddi
Responsable du master
master.mecanique@univ-fcomte.fr
03 81 66 62 38