Depuis plusieurs années déjà, les diplômes ne sont plus décrits uniquement comme une masse de connaissances à engranger, mais aussi et surtout sous forme de compétences à acquérir pour les étudiants. La démarche d'amélioration continue des formations que l'université de Franche-Comté (UFC) développe actuellement s'inscrit dans cette logique. L'ensemble du cursus de l'étudiant est repensé par rapport à un profil attendu à l'issue du diplôme. Les contenus et la forme de chaque cours sont conçus et articulés de façon à ce que chaque apprenant acquière progressivement, module après module, semestre après semestre, les compétences requises jusqu'à atteindre cet objectif final.
Les équipes pédagogiques qui s’impliquent dans cette démarche s’assurent que chaque unité d’enseignement est bien au service de l’acquisition des compétences visées, en examinant une cinquantaine de critères1. Ces derniers sont regroupés au sein de quatre principaux axes : l’articulation des formations avec la recherche, les liens avec le monde socio-économique, la transformation pédagogique et l’évaluation par les étudiants. Ils concernent tous les aspects de la formation : structure, organisation, programme, contenus, activités, évaluation… On vérifie par exemple que les examens mesurent bien les compétences attendues ou que la méthode choisie est bien au service des objectifs d’apprentissage. Cette démarche suppose une réflexion sur les modalités des cours et parfois l'élaboration de nouvelles formes d'enseignement. « Il faut mettre les étudiants dans des situations spécifiques, les confronter à des cas pratiques et donc, parfois, réinventer la pédagogie », explique Émeline Sadoulet-Reboul. « C'est l'occasion de mettre en place des activités originales comme des jeux de rôles, des serious games, de l'apprentissage par projet », renchérit son collège Gaël Chevallier. Ces deux enseignants-chercheurs font partie des groupes « pilotes » qui, pendant deux ans, ont expérimenté cette nouvelle façon de penser la formation2.
Une assurance qualité pour les étudiants
« À travers cette démarche, nous sommes amenés à changer nos façons d'enseigner, explique Pascal Gillon, directeur des études à l'UFR SLHS3. On ne se contente pas de délivrer un savoir, on explique aussi aux étudiants ce qu'on va leur apprendre, ce qu'on attend d'eux, et ce sur quoi ils vont être évalués. Cela les responsabilise car on les incite à se positionner eux-mêmes sur des compétences. C'est très positif. Cela leur permet aussi de mieux comprendre ce qu'ils auront acquis à la fin de leur cursus et donc de mieux formaliser leurs compétences auprès des employeurs. Au lieu de dire "j'ai une licence en géographie", ils pourront par exemple dire "je suis capable de synthétiser un dossier, de travailler à partir de documents en anglais, d'utiliser un système d'information géographique, de faire une présentation en temps limité"… »
L'objectif de ce dispositif est de rentrer dans un processus de réflexion continu pour améliorer en permanence les diplômes. Une initiative remarquée par le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation (MESRI). « L'université de Franche-Comté a fait le choix courageux d'investir sur le long terme pour être à même de répondre aux évolutions de la société et à l'apparition de nouveaux métiers. Nous espérons qu'elle servira de démonstrateur pour d'autres universités », a déclaré Patricia Arnault, représentante de la Mission de la pédagogie et du numérique pour l’enseignement supérieur (MiPNES). Elle était, avec Anne Aubert, représentante de la direction régionale de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (DGESIP), à Besançon le 24 janvier pour participer à une matinée de présentation officielle de cette démarche. « Cette démarche d'amélioration continue nous permettra de rendre nos formations plus attractives à l'échelle européenne. La qualité des formations est d'ailleurs au centre des axes de réfléxion de la prochaine conférence de Bologne4 qui aura lieu à Paris en mai 2018 », explique Frédéric Muyard, vice-président chargé de la formation et de la vie étudiante à l'UFC.
Après deux années d'expérimentation avec une quinzaine de diplômes, l'établissement ambitionne aujourd'hui d'étendre sa démarche à l'ensemble de ses formations. Chaque équipe pédagogique volontaire pour s'y impliquer produit un dossier d’autodiagnostic construit selon une méthodologie précise. Elle y analyse ses points forts, ses points faibles et propose un plan d'action pour des améliorations. Pour accompagner ceux qui souhaitent s'investir dans cette démarche, une cellule dédiée a été mise en place à l’UFC. L'université proposera bientôt une labellisation aux formations les plus engagées dans ce processus.
- Ces critères sont inspirés des critères ESG (European Standard Guidelines).
- Les neuf groupes pilotes concernaient en premier lieu les cursus de master en ingénierie (CMI). Ces cursus particuliers allient les apports de la recherche à des pédagogies actives, et sont axés sur l’autoévaluation des étudiants. Ces CMI étant construits comme des ensembles cohérents de pédagogie innovante dans une continuité licence-master, ils étaient tout indiqués pour tester ce type de démarche.
- UFR Sciences de l'homme, du langage et de la société.
- Le Processus de Bologne est un processus de construction de l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES), au sein duquel 48 pays européens sont aujourd’hui impliqués. Les objectifs majeurs de ce processus sont de faire du continent européen un grand espace « sans frontières », où la mobilité des étudiants et des enseignants chercheurs est naturelle, et de rendre cet espace européen lisible et attractif vis-à-vis du reste du monde.