Quel temps fait-il en forêt ?
Moins chaud quand il fait chaud, moins froid quand il fait froid ! La forêt adoucit et régule les fluctuations des températures, telles qu’elles sont relevées dans les stations météo. Des constats et des mécanismes révélés par une étude d’envergure menée au cœur de la forêt du Jura, pour mieux comprendre ce milieu naturel et observer son évolution.
Si la météo et les variations de température font l’objet des plus vives attentions de la part des experts comme du grand public, elles ne suscitent que peu d’intérêt dès lors qu’on pénètre en forêt. Pourtant la forêt est un paysage d’importance. En Franche-Comté, elle couvre près de la moitié du territoire ; elle est synonyme de richesses pour l’homme, de l’exploitation du bois au tourisme, abrite sources naturelles et nappes phréatiques, et sert d’écrin à un écosystème riche, dont l’équilibre dépend justement en grande partie des températures et du climat.
Pour pallier ce déficit de connaissances, le climatologue Daniel Joly dirige depuis 2011 une étude au sein de la forêt jurassienne, la première de cette ampleur à être menée dans une forêt en France. L’observatoire comptait à l’origine trente capteurs de température, installés en vis-à-vis de ceux de Météo France, afin d’établir des comparaisons entre forêt et milieu ouvert. Depuis 2014, vingt autres capteurs complètent les investigations, et concernent des zones hors du périmètre de Météo France comme les fonds de vallée, les reculées ou certains points de la haute chaîne. De Clerval à Oyonnax, de la forêt de Chaux au val de Morteau, les capteurs fixés au tronc des arbres enregistrent les températures toutes les six minutes. « Nous terminons actuellement le traitement des données relevées sur trois années pleines, explique Daniel Joly. De là, nous pourrons fournir des modèles à la fois spatiaux, pour étendre nos estimations à une zone plus vaste, et temporels, comprenant des comparaisons avec les relevés Météo France depuis la fin du XIXe siècle et des prévisions d’évolution pour l’avenir. »
Tendance à la pondération
Si l’analyse n’est pas tout à fait terminée, les grandes tendances se dessinent : les amplitudes journalières sont moins importantes en forêt qu’en milieu ouvert, et quelle que soit la saison, il fait plus chaud le matin et plus frais l’après-midi à l’abri des arbres. De manière générale, les températures affichent en forêt 2°C de plus l’hiver (minimales) et 3 à 4°C de moins l’été (maximales). Les écarts avec le milieu ouvert s’atténuent lorsque le temps est maussade, et à l’inverse s’amplifient quand il fait beau. En forêt en effet, la plupart des variables climatiques sont modifiées par la végétation : le rayonnement solaire est capté par les feuilles et les branches, et la force du vent est atténuée. De même, l’humidité est plus importante, surtout en été en raison de la transpiration des végétaux, et en hiver, la neige accumulée sur les chemins de desserte forestière fond moins vite qu’en espace ouvert. Daniel Joly note l’importance de l’altitude dans cette analyse : « c’est la variable qui structure le plus rigoureusement la variation spatiale des températures des deux milieux ».
L’observatoire du climat est un projet de recherche mené par le laboratoire ThéMA, en lien avec le laboratoire Chrono-environnement et avec le soutien du parc naturel régional du Haut-Jura. Il est l’un des dispositifs de la ZAAJ, la Zone atelier Arc jurassien, labellisée en 2013 par l’INEE, l’Institut écologie et environnement du CNRS.
Article publié dans le numéro 273 de novembre 2017 du journal en Direct.
Contact
Daniel Joly
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daniel.joly@univ-fcomte.fr