Mongiovi Chiara et Crini Grégorio
« Moi, j’aurais bien aimé pouvoir me former en alternance ! Je trouve que c'est une bonne façon d’apprendre qui devrait se généraliser », remarque Nel Taurisson, leader technique chez Parkeon et tuteur d’un étudiant en première année de master Ingénierie systèmes et logiciels. Cette société dont les services recherche et développement sont situés à Besançon crée des solutions de gestion du stationnement et de billettique pour les transports publics. Elle a embauché cette année en contrat de professionnalisation trois étudiants de l’université de Franche-Comté, Quentin Perez, Corentin Rousselet et Corentin Tournoux, dans le cadre de ce nouveau cursus. « Jusqu’à présent, il n’y avait pas dans la région de formation à ce niveau en alternance, et certaines entreprises proposaient des contrats de professionnalisation sans trouver preneur. C’est un secteur en tension dans lequel il y a un vrai potentiel », affirment Fabrice Bouquet et Bruno Legeard, les enseignants-chercheurs à l’origine de la création de ce master.
Cette formule inédite de « double alternance » mêle enseignement à l'UFR ST1, cours par correspondance avec le CTU2 et deux longues périodes d’immersion en entreprise de huit et dix mois. L’année universitaire commence par des cours en présentiel (quatre mois en première année et deux en deuxième année), après quoi les étudiants partent travailler dans la société qui les emploie tout en poursuivant leur formation universitaire en télé-enseignement. Ils suivent leurs cours à distance, ont des devoirs à rendre, et échangent avec leurs professeurs par e-mail ou via des forums. Pour cela, l'entreprise leur dégage deux demi-journées par semaine. Ils étudient la programmation, les réseaux, les tests logiciels, l'algorithmique distribuée et la sécurité informatique3. Motivés, ils ne se montrent guère effrayés par le rythme de travail. « C’est sûr, les semaines sont chargées mais on sait pourquoi on a signé ! » plaisante Corentin Rousselet. « Ces formules d’enseignement sélectionnent des profils qui ont déjà une certaine maturité », souligne Fabrice Bouquet. Cependant, afin de vérifier qu’ils s'adaptent bien à l'enseignement à distance, les étudiants s'y essaient dès le premier trimestre dans le cadre d'un module par correspondance. Si cela ne leur convient pas, ils peuvent poursuivre leur master en présentiel4.
Maximiser le temps de présence en entreprise
À l’UFC, une dizaine d’étudiants profite déjà des avantages de cette formule qui donne la part belle au temps passé en entreprise. La continuité de ces périodes d’immersion permet aussi aux candidats de viser un bassin d’emploi plus large que la Franche-Comté sans être obligés de trouver deux logements. Ils perçoivent une rémunération, y compris pendant les périodes de cours, et bénéficient du double statut d’étudiant et de salarié. « Ça nous responsabilise : on se sent obligé de bien s’en sortir en master », commente Quentin Perrez.
Pour l’entreprise aussi, ce système est avantageux. « L’intérêt, c’est la durée : on peut construire une stratégie et leur confier quelque chose de créatif », explique Nel Taurisson. Sébastien Ribière, le tuteur de Corentin Tournoux, renchérit : « La personne fait véritablement partie de l’équipe et on peut lui donner des projets plus durables qu’à un stagiaire. » François Say, software manager chez Parkéon, ajoute : « Ce sont des individus qui vont prendre au bout d’un an une vraie valeur ajoutée. L’alternance constitue un très bon vivier de recrutement. »