Des salles de cours de l’ISIFC aux hôpitaux du Bénin
L’association étudiante Humabio collecte et répare du matériel biomédical pour des pays en développement. Julien Magnin-Feysot, étudiant à l’ISIFC, a passé six semaines au Bénin afin d’acheminer ce matériel et d'aider des hôpitaux. Récit d'une mission humanitaire fructueuse.
Quand il raconte son séjour à Cotonou, capitale économique du Bénin, Julien Magnin-Feysot, ne tarit pas d’anecdotes. Élève-ingénieur en dernière année à l’ISIFC1, le jeune homme a effectué une mission humanitaire dans plusieurs hôpitaux en juillet-août 2014. Cette expérience marquante, il l’a vécue en tant que membre d’Humabio, une association créée par des étudiants de l’ISIFC en 2006. Celle-ci compte une cinquantaine de personnes dont une quinzaine d’actifs. Elle s’est donné pour mission de récolter et de remettre en état du matériel médical usagé afin d'aider des hôpitaux de pays défavorisés.
Les mains dans le cambouis
Un local situé à quelques pas de l’école sert d’atelier de réparation et d’entrepôt pour des équipements biomédicaux et autres dispositifs d’aide à la personne. Ce matériel est récupéré auprès d’entreprises, de pharmacies, de services hospitaliers, ou donné par des associations partenaires. En ce moment, ce sont des fauteuils roulants, des lunettes de vue et des équipements d’ophtalmologie qui attendent, dans le local, de trouver une seconde vie.
Une fois remis en état de marche, le matériel est récupéré par BIP Humanitaire, une association basée à Meaux (Seine-et-Marne). « Nous avons un partenariat solide avec eux, explique Julien. Ils possèdent un grand hangar dans lequel ils entreposent le matériel. Ils regardent ensuite quels sont les besoins et les demandes sur le terrain. » L’étudiant connait bien le fonctionnement de BIP Humanitaire car, à l’instar de plusieurs étudiants de l’ISIFC chaque année, il y a effectué un stage de deux semaines pendant lesquelles il a réparé, trié et étiqueté des dispositifs médicaux. Le travail du jeune homme ne s’est pas arrêté là puisqu’il a eu l’occasion de se rendre dans un des pays d’acheminement du matériel, en l’occurrence le Bénin. « Les besoins ne concernent pas seulement les équipements, précise-t-il. Il faut également des ingénieurs, des techniciens… Les étudiants partent toujours en mission dans des endroits où BIP Humanitaire s’est déjà rendue et où ils ont des contacts sur place. »
Humanitaire en terre inconnue
L’étudiant réussit à financer son billet d’avion en vendant des produits régionaux et en trouvant des sponsors, puis il s’envole pour Cotonou. « J’ai été accueilli comme un roi, raconte-t-il. Le prêtre qui organisait ma venue avait mis un appartement à ma disposition avec tout le confort. J’avais même un chauffeur pour me déplacer dans la ville si besoin ! » Sur place, il est attendu dans le plus grand hôpital du diocèse ainsi que dans quatre cliniques plus petites pour distribuer et installer le matériel médical. Problème : le container, dont l’arrivée devait coïncider avec celle du jeune homme, sera finalement retenu en douane plusieurs semaines. Mais ce n’est pas le travail qui manque pour Julien, qui sera amené à dépanner des machines et former des personnels hospitaliers. « Le point de vue selon lequel l’Afrique sert de poubelle à l’Europe n’est pas tout à fait faux, observe le jeune homme. On leur envoie du matériel mais personne ne leur apprend à s’en servir, à le réparer et il n’y a pas de techniciens sur place, donc pas de maintenance. » L’étudiant met à profit son DUT d’électronique, obtenu avant son entrée à l’ISIFC, pour effectuer une maintenance préventive sur les appareils, ausculter ceux qui ne fonctionnent plus et les remettre d’aplomb quand c’est possible : « Un scanner est par exemple tombé en panne car il n’y avait pas eu de maintenance pendant six ans. Pour le réparer, il aurait fallu changer toutes les pièces », se souvient-il.
Former les personnels
Au fil des jours, le jeune homme découvre un environnement et des conditions de travail différents de ce qu’il a pu observer dans les hôpitaux français. « Quand j’ai voulu réparer un autoclave [appareil qui stérilise les instruments], j'ai reçu une grosse décharge en touchant la machine car il y avait un court-circuit. Seulement là-bas, il n’y a pas de disjoncteur. Officiellement, ils se réfèrent aux normes de sécurité européennes, dans la mesure du possible.»
Si les médecins de Cotonou sont nombreux à avoir étudié en Europe, l’étudiant réalise cependant que les infirmières n’ont pas été formées à utiliser correctement certaines machines, comme les couveuses pour les nouveau-nés. Il décide alors de mettre en place un protocole : « J’allais de service en service pour repérer les problèmes, trouver des solutions et former le personnel à bien se servir des appareils, en veillant à être très diplomate. »
Ses allées et venues dans les locaux des hôpitaux lui font prendre conscience des mauvaises conditions d’hygiène. « Au Bénin, on n’attrape pas d’infection à l’hôpital : malheureusement on meurt souvent d’autre chose avant, explique-t-il. Le taux de mortalité dans les hôpitaux est plus élevé qu’en France et les médecins n’opèrent qu’en dernier recours car c’est très onéreux pour les patients. J’ai essayé de pointer les problèmes d’hygiène et de mettre en place quelques règles simples en proposant un protocole au personnel de l’hôpital. »
Réception du matériel
Une quinzaine de jours avant son départ, le container arrive enfin. À l’intérieur, des lits, divers appareils électroniques, des lampes de bloc opératoire, des draps, des compresses dont la date de péremption approche… « J’ai été content de retrouver du matériel que j’avais réparé et étiqueté lors de mon stage à BIP », raconte Julien. Dans l'hôpital principal, les ouvriers terminent la construction d’un nouvel étage qui sera meublé grâce au chargement du container. Le jeune homme participera à la réception des travaux et à l’aménagement des locaux, ce qui lui réservera quelques surprises : « Quand on a commencé à installer les lits électriques, on s’est rendu compte qu’il n’y avait qu’une seule prise de courant dans les chambres », sourit-il.
Pour Julien, cette immersion dans les hôpitaux de Cotonou s’ajoute à une longue liste d’engagements associatifs. Comme lui, tous les ans depuis 2012, ce sont trois ou quatre étudiants de l’ISIFC qui partent en mission à Madagascar, au Togo, au Bénin ou à Haïti. Une expérience forte pour ces futurs ingénieurs, aussi bien humainement que professionnellement.
- L'Institut supérieur d'ingénieur de Franche-Comté forme aux métiers du secteur biomédical.
Contact
Julien Magnin-Feysot
julien.magnin-feysot02@edu.univ-fcomte.fr