Portrait de François Courvoisier à l'institut FEMTO-ST
Jérémy Querenet - UFC

La matière, le laser et François Courvoisier

Chargé de recherche en optique à l'institut FEMTO-ST, François Courvoisier vient de recevoir le prix Aimé Cotton décerné par la Société française de physique. C'est l'occasion de revenir sur ses travaux sur le laser femtoseconde.

Dans le domaine de l’usinage, les lasers ultrabrefs possèdent l’incroyable faculté d’enlever de la matière à n’importe quel matériau, du carton au métal en passant par le diamant, sans changer d’outil. Le laser femtoseconde est l’un des plus puissants actuellement disponibles. Il est très utilisé dans l’industrie pour la découpe d’écrans d’ordinateurs ou la fabrication de buses d’injection pour les moteurs. Dans les laboratoires, il est la source de nombreuses recherches, comme celles que mènent François Courvoisier et son équipe à l’institut FEMTO-ST dans le domaine du micro-usinage, qui permettront un jour d’améliorer encore les procédés industriels. Ces chercheurs sont les seuls au monde à réussir à contrôler le dépôt d’énergie de la lumière dans la matière aux échelles submicroniques.

Cette maîtrise signifie la possibilité de percer dans du verre des trous de quelques centaines de nanomètres de diamètre sur une longueur mille fois plus grande, avec une seule impulsion laser. Mis côte à côte sur une lamelle de quelques micromètres d’épaisseur, de tels perçages donnent la possibilité de « cliver » le verre, c’est-à-dire de le casser d’une manière franche le long de cette « prédécoupe », quasiment sans altération de la matière. Ce procédé signé FEMTO-ST fait actuellement l’objet d’un dépôt de brevet.

Une seule impulsion laser pour un micro-usinage parfait

Une autre recherche en cours, également très prometteuse, concerne le perçage de trous de diamètre un peu supérieur, de l’ordre de trois dizaines de micromètres – ce qui reste quand même inférieur à l’épaisseur d’un cheveu – pour des applications cette fois tournées en priorité vers les besoins de la microélectronique. L’objectif : percer du verre d’une épaisseur elle aussi micrométrique, sans casse et sans bavures. Cela grâce une seule impulsion laser – là où un millier environ sont aujourd’hui nécessaires – afin de multiplier la vitesse d’usinage de plusieurs ordres de grandeur et d’améliorer la qualité de la découpe. La maîtrise du dépôt de l’énergie dans la matière est là encore la clé…. « L’impulsion laser crée un plasma au cœur du matériau. C’est ce plasma qui, grâce à la pression et à la température qu’il génère, fait exploser la matière et assure son perçage ; mais c’est lui aussi qui très vite s’érige en une sorte de bouclier, empêchant la lumière de pénétrer davantage dans le matériau, explique François Courvoisier. Notre objectif est de contrôler davantage les interactions entre le laser et le plasma, afin de les rendre les plus efficaces possible. »

Jérémy Querenet - UFC
[Actu des labos] La matière, le laser et François Courvoisier

Une prestigieuse bourse européenne vient d’être accordée à François Courvoisier pour l’aider à remporter ce challenge, un financement Consolidator Grant de l’ERC (European Research Council) d’un montant de deux millions d’euros sur cinq ans.

Le chercheur s'est également vu décerner le prix Aimé Cotton 2015 de la Société française de physique en mars pour ses travaux sur l'optique ultrarapide en régime linéaire et non-linéaire et leur application à l'ablation laser. Le jury a souligné les avancées notables réalisées par François Courvoisier dans les domaines de l'optique et de la photonique.

Article issu du dossier « La 4e révolution industrielle est en marche » publié dans le journal en direct no 263 de mars-avril 2016.

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