Un nouvel outil numérique pour l’enseignement du français
Développé au centre Lucien Tesnière par Yves Bordet, le projet Doxilog se compose d’une application qui évalue la difficulté de textes et d’une anthologie interactive.
L’illettrisme est une réalité qui a frappé Yves Bordet lorsqu'il était professeur de français en Suisse et qui l’a amené à s’interroger sur la façon dont on enseigne la langue française aujourd’hui. Il s’est aperçu que la littérature était parfois mise de côté, notamment par les enseignants de français langue étrangère (FLE), car jugée peu adaptée à l’apprentissage d’une langue et trop complexe. Lui milite au contraire pour que les textes des grands auteurs soient au cœur de la pédagogie. « J’ai toujours pensé que la langue doit s’apprendre avec des documents authentiques et pas forcément avec des documents produits par les enseignants », explique Yves Bordet, qui insiste également sur les bénéfices de l’apprentissage par cœur et de la récitation.
Ce chercheur a travaillé à proposer une approche pédagogique faisant usage des moyens numériques et remettant la littérature au cœur des apprentissages. Les résultats de ses recherches lui ont permis de créer une application en ligne, Doxilog, avec l’aide d’un informaticien. Une fois le texte saisi (par exemple un extrait de roman ou un poème), l’application en analyse le niveau de difficulté et indique l’âge auquel ce texte est accessible, pour les enfants et les adolescents francophones, et le niveau en français langue étrangère (FLE), de A1 à C21.
Pour créer cet outil, Yves Bordet a tout d’abord réalisé la liste de ce qu’il appelle le « français fondamental littéraire » ou « français pérenne », comprenant environ 1 500 mots. Pour cela, il a étudié un corpus de textes littéraires en prose et en vers, dont certains sont issus de manuels scolaires. Ses travaux montrent que « la littérature française est composée à 90 % de ces mots ». On retrouve notamment des « mots outils », comme les conjonctions ou les prépositions. L'analyse de l'accessibilité prend en compte cette liste mais aussi la ponctuation et la longueur du texte. L’application donne en outre accès à la liste des mots pérennes et note leur nombre et leur proportion dans le texte.
Ces dernières années, un logiciel comparable a été mis au point par l’éditeur scolaire Nathan. Partant d’une méthode différente, il indique seulement la classe de primaire ou de secondaire (système scolaire français) auquel le texte est accessible et ne permet pas d’analyser des textes courts. L’avantage de l’outil développé au centre Lucien Tesnière est également d’être gratuit et disponible partout dans le monde, puisqu’il suffit de se rendre sur le site Internet de Doxilog.
Une anthologie de 151 textes issus de la littérature sera également consultable sur le site. Classés par âges et par niveaux de FLE, ces textes seront, de plus, disponibles en version sonore, notamment pour les non-voyants. Le chercheur a prévu de développer des versions de son application en anglais, mandarin, espagnol, russe, arabe… Il sollicite actuellement des financements pour mener à bien ce projet. « La recherche est déjà très avancée en anglais et en bonne voie pour plusieurs autres langues », confie-t-il.
1. Le cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) définit des niveaux pour évaluer les compétences dans une langue étrangère : A1 et A2 correspondent à un niveau débutant/élémentaire ; B1 et B2 à un niveau intermédiaire, C1 à un niveau avancé et C2 à un niveau de maîtrise de la langue.
Contact
Yves Bordet
ybordet@valsainte.ch
Centre Lucien Tesnière
http://tesniere.univ-fcomte.fr
Doxilog
http://www.doxilog.com