Précarité menstruelle : l’université de Franche-Comté installe 31 distributeurs de protections hygiéniques
Les étudiantes de l’université de Franche-Comté peuvent désormais se servir gratuitement en tampons et serviettes, 100% coton bio, dans les différentes composantes et les lieux de vie de l’université. Ce dispositif s’inscrit dans une démarche globale : un engagement pour promouvoir la santé et le bien-être des étudiants, en sensibilisant au quotidien à l’égalité et à la diversité.
En France, un tiers des étudiantes déclarent avoir besoin d’une aide financière pour se procurer des protections hygiéniques*. Cette précarité menstruelle est économique et impacte directement la réussite des étudiantes
L'accès aux protections périodiques constitue un véritable enjeu de santé, mais également un enjeu de solidarité et d'égalité des chances. C’est pour cette raison, que l’université de Franche-Comté s’est engagée dans la lutte contre la précarité menstruelle. Le projet est né lors de la crise sanitaire. L’université de Franche-Comté s’est concentrée sur la précarité étudiante en créant notamment une commission dédiée à ce sujet composée d’élus étudiants volontaires. « Chacun pouvait amener une thématique sur lequel il voulait que l’université se penche. La précarité menstruelle est un des premiers sujets qui a été mis sur la table » explique Inès Laville, docteure en sociologie, ancienne élue à la commission recherche de l’université.
Cette commission précarité lance alors un questionnaire à destination des étudiants et étudiantes en juin 2021 avec pour objectif de recenser les difficultés et besoins autour de la précarité menstruelle. En deux semaines, les étudiants élus obtiennent plus de 800 réponses. « On s’est rendu compte que pour une majorité d’étudiantes et d’étudiants qu’il était nécessaire d’installer des distributeurs de protections hygiéniques » témoigne Inès Laville, étudiante élue membre de la commission précarité.
1 étudiante sur 10 contrainte de fabriquer ses protections elle-même
En effet, le coût des protections hygiéniques pousse certaines étudiantes à faire un arbitrage entre produits d’hygiène et produits de première nécessité. « Cette précarité menstruelle peut empêcher de suivre leur formation dans de bonnes conditions. Certaines étudiantes vont rester chez elles pendant leurs règles » explique Wiam Bama, étudiante en master de socio-anthropologie, élue CGT à la CVFU. En France, 1 étudiante sur 10 est contrainte de fabriquer ses protections elle-même d’après l’enquête de la FAGE*.
« Nous sommes une université de valeurs, et parmi ces valeurs on trouve l’engagement et la qualité. Force est de constater que les menstruations ne touchent que les femmes. Les règles ne touchant que nos étudiantes, cette taxe rose ou taxe tampon n’impacte que leur budget. Il nous semblait nécessaire de ne pas accentuer leur précarité et de rétablir une égalité » assure Anne Tatu, vice-présidente vie étudiante.
Ces boites, financées en partie par la Région Bourgogne-Franche-Comté et le Crous Bourgogne-Franche-Comté, avec des fonds CVEC et la participation de l’AGEA Bourgogne-Franche-Comté, sont installées dans les différentes composantes de l’université sur tous ses sites : Besançon, Belfort, Montbéliard et Vesoul (liste complète des emplacements des boites).
Avoir ses règles ne doit pas être une honte
« On remet sur des lieux publics, quelque chose qui est de l’ordre privé. En outre de la symbolique public/privé, on en fait une question sociétale, justifie Wiam Bama. Avoir ses règles ne doit pas être une honte. Les boîtes sont installées dans les composantes, au plus près des étudiants, sur les lieux d’études ».
En effet, le choix de l’emplacement s’est fait de manière concertée en prenant en compte les résultats du questionnaire. « Nous ne voulions pas cacher ces distributeurs. Dans certaines composantes, ils sont installés dans des toilettes mixtes, quitte à ce qu’un étudiant puisse aller chercher une protection pour une autre étudiante. C’est important que ces boîtes s’affichent comme faisant partie du quotidien » explique Anne Tatu.
Cette visibilité contribue à la levée du tabou. « On nomme les règles avec des noms d’oiseaux inimaginables : « les coquelicots », « les Anglais qui débarquent », on va leur trouver des expressions qui permettent d’esquiver le mot, illustre la vice-présidente vie étudiante. Mais ce sont des menstruations, ce sont des règles, elles arrivent tous les mois, et elles n’ont pas à être honteuses"
Ce dispositif s’inscrit donc dans une démarche globale : un engagement pour promouvoir la santé et le bien-être des étudiants, en sensibilisant au quotidien à l’égalité et à la diversité.
On retrouve dans ces boîtes 4 types de protection, toutes en coton 100% bio. L’université s’engage aussi pour le développement durable. « Nous avons l’idée d’aller encore plus loin, assure Anne Tatu. La deuxième étape de ce projet est de pouvoir proposer des protections réutilisables comme les culottes menstruelles et les cups. Aujourd’hui il faut qu’on pense à plus long terme en cherchant les moyens de financer et distribuer ces protections durables et de sensibiliser à leur utilisation. »
*Enquête de la FAGE (Fédération des associations générales étudiantes) de 2021