La psychiatrie, une discipline médicale comme les autres
Un colloque qui s'est tenu le mois dernier à Besançon a mis en évidence le rôle essentiel de la psychiatrie au sein des territoires de santé et souligné la nécessité de faire évoluer son image.
Les 16 et 17 avril derniers, plus de cent cinquante médecins, universitaires, chercheurs, directeurs d'hôpitaux, représentants des équipes soignantes et des patients et de leurs familles, se sont réunis pour réfléchir aux enjeux actuels de la psychiatrie. Ce colloque avait plusieurs ambitions : réaffirmer la position de cette spécialité parmi les autres disciplines médicales, dédramatiser les soins spécialisés apportés aux patients et répondre aux défis de l'enseignement et de la recherche.
Quand on parle de psychiatrie, on pense d’emblée à des pathologies lourdes, à des patients enfermés ou ne pouvant pas être guéris. Ce préjugé ancré dans les mentalités empêche certaines personnes de consulter ou d'en parler à leurs proches, par honte ou par crainte d'un jugement négatif. Cette image particulière de la psychiatrie qui fait l'amalgame entre maladie mentale et folie est préjudiciable. C'est pourtant une spécialité médicale qui soigne toutes sortes de pathologies : aussi bien des psychoses que des troubles bipolaires de l'humeur, des troubles anxieux et dépressifs, des troubles du comportement alimentaire ou encore des conduites addictives. Des maladies qui peuvent toucher plus d’une personne sur quatre dans la population. Cependant, la psychiatrie reste encore trop souvent à l'écart des autres spécialités et tout particulièrement de la médecine générale.
Pourtant, dans certains domaines, la psychiatrie se pose en précurseur, pour les alternatives à l'hospitalisation, par exemple, plus de 80 % des activités se déroulant en ambulatoire. Elle est également pionnière en matière de réseaux de soins et de santé, ou d'ouverture sur la ville et la société. Or, la médecine entend développer une démarche vers les territoires pour l'ensemble de ses spécialités. En œuvrant au sein des Groupements hospitaliers de territoires, des Communautés psychiatriques de territoires, des Projets territoriaux de santé, la psychiatrie est l'un des moteurs de l'évolution du système de santé, du développement de la prévention, de la gradation des soins, des parcours de soins, et de leurs financements.
Développer l'enseignement et la recherche
Les participants au colloque ont souligné l'importance, dans une démarche de véritable démocratie sanitaire, de reconnaître le rôle de l'ensemble des acteurs du soin : celui des équipes infirmières, avec les « infirmiers en pratique avancée », celui des psychologues cliniciens et celui des patients et de leur entourage. Ils ont également insisté sur la nécessité d'inscrire la psychiatrie dans les enseignements et les propositions de stages en médecine générale et dans tout le cursus des études médicales. L'enseignement offre dorénavant des options vers la psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, vers la psychiatrie du sujet âgé, ainsi que des formations spécialisées partagées avec d'autres disciplines comme l'addictologie ou la médecine légale. Des diplômes d'université et des masters transversaux associant infirmiers, psychologues, médecins à d'autres acteurs des métiers du médicosocial ou de la justice, permettent désormais des échanges et une culture partagée avec d'autres intervenants du secteur.
En matière de recherche, la variété et l'imbrication des facteurs associés aux troubles psychiatriques plaide pour l'interdisciplinarité : la prise en compte des approches des neurosciences, de l'épigénétique à l'imagerie fonctionnelle, et celles des sciences humaines et sociales, psychologiques et sociologiques, permet de construire une discipline intégrative. L'ambition, aujourd'hui, est de mieux associer recherche clinique et recherche fondamentale, de multiplier le nombre de laboratoires labellisés, de participer davantage à des programmes européens et internationaux, mais aussi d'augmenter les budgets pour obtenir des moyens identiques à ceux d'autres pays européens ou des États-Unis.
Sachant que plus de 25 % de la population souffre, a souffert, ou souffrira de troubles mentaux, chacun est concerné, pour soi-même ou pour ses proches. « La santé mentale et la santé physique participant ensemble au bien-être de l'être humain, elles ne sauraient être séparées au sein de la médecine », telle a été la conclusion de ce colloque organisé sous le haut patronage de la ministre des Solidarités et de la Santé.
Sources : communiqué de presse du CHU de Besançon et synthèse du colloque rédigée par Catherine Tondu.