De l’intelligence artificielle pour améliorer l’imagerie
Combiner plusieurs techniques d’analyse d’image et d’intelligence artificielle pour tirer parti de leurs avantages respectifs. Voilà l’idée d'une équipe d’informaticiens de l’institut FEMTO-ST pour obtenir des reconstitutions en 3D de tumeurs cancéreuses du rein chez l’enfant.
Le projet de recherche SAIAD, pour « Segmentation automatique de reins tumoraux chez l'enfant par intelligence artificielle distribuée », a été lancé le 16 janvier. Il répond à un besoin exprimé par les médecins du service de chirurgie pédiatrique du CHRU de Besançon pour le traitement de néphroblastomes, des cancers du rein qui touchent les enfants de moins de 6 ans. Afin de poser leur diagnostic et de préparer l’intervention chirurgicale, ces médecins ont besoin de connaître précisément l’étendue de la tumeur et son positionnement dans le rein. L’idéal pour eux serait d’en avoir une représentation en trois dimensions. Or, s’il est envisageable de procéder à une reconstitution 3D à partir d’une série d’images scanner, cela n’est pas simple. Il faut compiler les données issues de pas moins de 250 clichés. Des clichés que les radiologues expérimentés interprètent aisément, mais dans lesquels un ordinateur a du mal à faire le distinguo entre les différents tissus biologiques représentés par des variations subtiles dans les niveaux de gris de l’image. Cette reconnaissance par un ordinateur des différents éléments du cliché s’appelle la segmentation. Il est crucial que celle-ci soit réalisée au mieux. S’il existe de nombreux programmes informatiques dédiés à cet exercice, aucun n’est parfait et on est loin de pouvoir se passer de l’expérience du médecin. Autant dire que l’analyse individuelle des 250 images nécessaires à la reconstitution 3D par un radiologue serait extrêmement chronophage.
« La segmentation est un véritable verrou technologique dans la communauté de l’imagerie », confirme Julien Henriet, pilote du projet SAIAD. Cet enseignant à l’IUT de Belfort-Montbéliard et chercheur en informatique à l’institut FEMTO-ST a pour spécialité la combinaison de différents programmes d’intelligence artificielle. « Plutôt que d’augmenter la puissance de calcul, on va chercher à imiter le fonctionnement de l’homme qui raisonne à partir de son expérience pour s’adapter à des situations nouvelles », explique-t-il. L’équipe du projet SAIAD va ainsi chercher à agréger différents procédés de segmentation et différents outils de l’intelligence artificielle (raisonnements à partir de cas, réseaux de neurones artificiels et deep learning, systèmes multi-agents) pour tirer parti de leurs avantages respectifs et aboutir au final à une segmentation la plus précise possible.
Ce projet qui a fait l'objet d'un financement INTERREG1 implique cinq enseignants-chercheurs du département d’informatique (DISC) de l’institut FEMTO-ST2, des médecins du CHRU3 et des chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) experts dans le domaine de la segmentation. Deux sociétés privées, CFI et IDO-In4, vont se charger du traitement et du stockage des dossiers médicaux à partir desquels les programmes vont être élaborés, ainsi que de la reconstitution 3D. Rendez-vous dans trois ans pour apprécier les résultats.
- Interreg est un programme européen de coopération entre les régions européennes. Interreg France-Suisse soutient des projets transfrontaliers impliquant a minima un partenaire français et un partenaire suisse. Côté français, c'est le fonds européen de développement régional (FEDER) qui intervient dans le financement du projet. Côté suisse, se sont des crédits fédéraux et/ou cantonaux qui interviennent dans le financement du projet.
- Julien Henriet Hervé Guyennet, Jean-Christophe Lapayre, Christophe Lang et Violetta Féléa
- Les services de chirurgie pédiatrique et de radiologie pédiatrique, et en particulier Frédéric Aubert
- IDO-In, ex Covalia est une ancienne start up de l’UFC. Elle est spécialisée dans la télémédecine, la transmission et le stockage sécurisés des informations médicales.