Voyage dans la troisième dimension
Le Gymnase-espace culturel de l’université propose une plongée dans l'univers des hologrammes à travers une exposition aux dimensions multiples : historique, scientifique, artistique et ludique.
Le laboratoire d'optique de Besançon (LOBE, devenu depuis département d'optique de l'institut FEMTO-ST) s'est distingué par le passé parmi les pionniers de l'holographie. Si ce procédé a été imaginé, sur le plan théorique, dès les années 1940, c'est seulement avec l'arrivée du laser qu'il a pu être mis en œuvre, une vingtaine d'années plus tard.
Le LOBE a fabriqué son premier hologramme en 1964. Treize ans après, deux de ses membres créaient l'entreprise Hololaser pour en faire le commerce. Le Gymnase-espace culturel de l'université donne actuellement à voir des collections d'hologrammes issues des fonds privées de cette entreprise et des archives de l'institut FEMTO-ST. Avec cette exposition baptisée « L'expérience holographique », les anciens chercheurs du LOBE comme Gilbert Tribillon, Claudine Bainier, Jean-Marc Fournier et Nicole Aebischer (absente sur cette photo) voient pour la première fois leurs œuvres rassemblées.
Un objet, quel qu'il soit, renvoie des rayons lumineux dans tous les sens. Pour réaliser un hologramme de cet objet, on enregistre une figure d'interférences entre ces ondes et une onde de référence provenant du laser. Autrement dit, c'est le schéma créé par l'addition et la soustraction de ces ondes qui est fixé sur une plaque de résine photosensible. En éclairant à nouveau cette plaque avec la même source lumineuse, on recrée la lumière renvoyée par l'objet. Cela permet de le visualier en volume et sous des angles différents. Sur cet hologramme, trois maquettes de bateaux donnent véritablement l'impression de sortir de leur cadre. Contrairement à la photographie, l'holographie n'utilise pas de lentille et ne pose par conséquent pas de problème de profondeur de champ. C'est ce qui permet de représenter des objets de grande taille tout en conservant une image nette.
L'image holographique est une véritable sculpture de lumière, comme on peut le vérifier en plaçant un calque à différents endroits de ce volume.
Cet hologramme d'une figure mythologique franc-comtoise, la Vouivre, a été réalisé en 1976 d'après une statue empruntée au musée des beaux-arts et d'archéologie de Besançon. Cette référence à la culture locale était un moyen de faire connaître le savoir-faire du laboratoire en dehors du milieu scientifique. Les chercheurs ont eu recours à un effet spécial, en réalisant deux enregistrements successifs, pour rendre les yeux brillants.
En 1975, le LOBE reçoit une commande particulière. Il s'agit de réaliser des hologrammes mannequins de mode destinés à la vitrine d'un magasin parisien. Jusqu'alors habitués à travailler sur des surfaces de l'ordre d'une dizaine de centimètres carrés, les chercheurs décident de relever le défi pour produire leurs premiers hologrammes de grande taille (50 cm par 60 cm). Sept modèles de mannequins ont ainsi pu être présentés en haut des Champs-Élysées, sur un tourniquet qui mettait en valeur leur relief.
Les visiteurs de l'exposition présentée au Gymnase-espace culturel sont confrontés à quatre mannequins à première vue identiques mais qui diffèrent en réalité par quelques imperfections. En effet, le moindre mouvement lié à une vibration ou à un soufle d'air lors de l'enregistrement crée des défauts.
Lors de la présentation d'un hologramme réalisé pour le lancement de TF1, le journaliste François de Closets avait déclaré : « Demain vous aurez peut-être chez vous un hologramme de la Vénus de Milo. » C'est cette citation qui a donné l'idée du sujet de ce qui allait devenir le plus grand hologramme au monde. Au printemps 1976, le LOBE réalise cette image en volume de la Vénus de Milo grâce à une très bonne copie envoyée par le musée du Louvre. Présentée à l'exposition universelle de Tokyo en 1977, celle-ci a été cassée au retour, ce qui n'empêche pas la restitution de la Vénus dans son ensemble. En effet, la moindre partie la plaque holographique contient l'information sur l'intégralité de l'objet.
Autre record détenu par le LOBE : celui du plus grand volume holographié en 1980, soit trois mètres cubes, avec cette représentation d'un salon, œuvre de l'artiste australienne Paula Dawson intitulée There’s no place like home. Le faisceau laser a été divisé en différentes parties de façon à donner l'impression qu'un spot éclaire le lampadaire.
Cette maquette du quartier de la Défense commandée par une société d'urbanisme pour le compte de la Ville de Paris a été la première réalisation de la société Hololaser, créée par Jean-Louis et Gilbert Tribillon et Jean-Marc Fournier en 1979. À l'époque, les immeubles n'étaient pas construits et il s'agissait d'un projet futuriste.
Pour ce modèle utopique de maison sous la mer réalisé en 1980, un éclairage spécifique a été utilisé afin de reproduire une ambiance évocatrice des fonds marins.
Cet hologramme réalisé pour la RATP à partir de la maquette un vieux modèle de wagon de métro (la Sprague) figure sans doute parmi les plus spectaculaires de l'exposition. Il est en effet possible d'en visualiser l'intérieur en passant la tête dans l'image en volume.
En réalisant des hologrammes d'hologrammes, les chercheurs arrivent à produire différents effets comme en témoignent plusieurs images de la déesse chatte Bastet, dont l'une donne vraiment une impression de mouvement. Cette sculpture du musée du Louvre a cependant posé des difficultés aux chercheurs car son matériau très mat réfléchissait peu la lumière.
Le procédé holographique peut utiliser d'autres sources lumineuses que le laser comme en témoigne ce dauphin d'un mètre carré initialement destiné à un parc d'attraction. Ces hologrammes dits « arc-en-ciel » ont la particularité d'être visibles en lumière blanche et d'avoir plusieurs couleurs qui varient selon l'angle d'observation.
D'autres sculptures de lumières aux sujets hétéroclites : un ange, un Airbus, Elvis Presley, une femme qui se retourne dans son sommeil, ou encore une mygale, attendent les visiteurs au Gymnase-espace culturel de l'université jusqu'au 15 novembre.
Cette exposition est proposée dans le cadre des évènements LUX ! organisés pour l'Année internationale de la lumière. Elle a été réalisée par le service Sciences, art et culture de l'université, en collaboration avec d'anciens membres du LOBE et de l'entreprise Hololaser, l'institut Femto-ST, Radio Campus, la Grosse entreprise (association de promotion du spectacle vivant) et le collectif Tricyclique Dol pour la scénographie.
Voir le reportage en vidéo sur l'exposition réalisé par le service Sciences, arts et culture.