Une vue du Doubs
Alex Andreoli
Auteur 
Delphine Gosset

Les systèmes de traitement de l’eau laissent passer des bactéries multirésistantes

Une équipe de microbiologistes bisontins a montré la présence d’une souche d’Escherichia coli résistante aux antibiotiques dans les rejets de stations d’épuration, mettant ainsi en évidence un mécanisme potentiel de la propagation de ces bactéries.

Les bactéries multirésistantes représentent un problème de santé publique qui inquiète la communauté scientifique car elles peuvent provoquer des infections sur lesquelles les traitements antibiotiques sont inefficaces.

Parmi ces bactéries figure Escherichia coli. Ce micro-organisme qui fait naturellement partie de la flore intestinale humaine est la plupart du temps inoffensif. Il en existe cependant une sous-population capable de produire des enzymes qui inactivent les antibiotiques1. Celle-ci est présente chez l’homme, qui peut être porteur sain, chez des espèces animales et dans certains produits alimentaires. On en trouve dans les excréments humains et, par conséquent, dans les eaux usées.

Une équipe du laboratoire Chrono-environnement2 a cherché à élucider les causes de la diffusion de cette bactérie dans l’environnement. Les chercheurs ont prélevé des échantillons d’eaux usées au niveau des égouts de la ville de Besançon. L’analyse bactériologique a révélé qu’il y avait davantage de bactéries de ce type dans les égouts des hôpitaux que dans ceux de la ville. Ils se sont également intéressés au devenir de ces bactéries au niveau des stations d'épuration.

Leurs résultats montrent que les systèmes de traitement de l’eau éliminent environ 95 % des Escherichia coli multirésistantes, mais en laissent passer une partie. Cette souche reste donc présente dans les eaux qui sont rejetées dans le Doubs, ainsi que dans les boues produites par ces stations qui sont utilisées comme fertilisants dans les cultures.

« Il est peu probable qu’on la retrouve au niveau des céréales et la contribution de ces rejets à la contamination humaine n’est pas démontrée. Il faudrait cependant améliorer les systèmes de traitement de l’eau afin d’éliminer ces bactéries, au même titre que d’autres polluants. Le cas de Besançon n’est pas isolé : les méthodes utilisées ici sont les mêmes qu’ailleurs », explique Xavier Bertrand, pharmacien biologiste au service d’hygiène hospitalière et chercheur au laboratoire Chrono-environnement, qui a piloté cette étude3. « Ce phénomène est bien connu des microbiologistes. Il a été mis en évidence pour d'autres bactéries et dans d'autres pays. L'un des principaux apports de notre étude est d'avoir permis de quantifier ces rejets », précise-t-il.

Le travail va se poursuivre à travers une collaboration avec l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) de Dijon pour étudier la survie des souches d'Escherichia coli multirésistantes dans l'environnement.

  1. Les bêta-lactamases à spectre étendu
  2. En collaboration avec un informaticien de l’institut FEMTO-ST
  3. Cette étude a été menée dans le cadre d'un projet de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) : EUCOLIB.

Contact

Xavier Bertrand
03 81 66 90 53
Laboratoire Chrono-environnement
http://chrono-environnement.univ-fcomte.fr

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