Main sur une surface
Ludovic Godard
Auteur 
Catherine Tondu

Le sens du toucher scientifiquement évalué

Les constructeurs automobiles français, notamment Renault, sont à l’origine du développement de l’haptique, cette science qui est au toucher ce que l’optique est à la vision et l’acoustique à l’ouïe. Le premier forum international Haptique a réuni fin octobre à Besançon tout le gotha (ou presque !) de l’automobile de luxe : Aston Martin, Audi, BMW, Jaguar, Land Rover, Toyota…

Car à l’intérieur d’une voiture de luxe, la sensation ressentie au contact du velouté d’un cuir ou du poli d’une loupe d’orme influence de manière décisive l’intention d’achat. L’initiative prise par l’Institut FEMTO-ST et l’entreprise allemande Ziegler-Instruments a donc reçu un accueil favorable de la part de ce public d’entrepreneurs fortement impliqués, auquel s’ajoute l’industrie du luxe dans son ensemble. À bien y regarder, les objets du quotidien sont eux aussi concernés, d’une souris d’ordinateur pour sa bonne prise en main au plan de travail d’une cuisine intégrée pour ses qualités perçues au contact quotidien.

Des mécanorécepteurs sous les doigts

L’haptique peut également décliner ses enjeux à un tout autre niveau, celui de la santé. « Nos doigts sont munis de mécanorécepteurs, sensibles à la pression que l’on exerce sur eux, à la température extérieure…, et qui sont situés plus ou moins profondément dans la peau », explique Guy Monteil, responsable du département Mécanique appliquée à l’Institut FEMTO-ST.

À la croisée des neurosciences et des sciences pour l’ingénieur, les recherches portent sur l’identification des récepteurs de la peau sollicités lors d’une sensation particulière. Cette question est au coeur du consortium interdisciplinaire COSTAM, qui a mobilisé sous l’égide du CNRS des équipes de recherche de Besançon, Dijon, Lille, Lyon, Mulhouse et Marseille pendant toute l’année 2013. « Lorsque nous aurons réussi à comprendre les relations entre l’intensité d’une sensation perçue et la réaction d’un récepteur cutané, la mesure de la déficience tactile puis la ré-
éducation du sens du toucher deviendront possibles », reprend Guy Monteil. De nouveaux tests vont solliciter tous les récepteurs sensoriels en utilisant des approches statiques, thermiques et dynamiques.

Enfin il sera possible dans le futur de générer une sensation : un effecteur tactile mis au point à Lille est déjà capable de reproduire un contraste au toucher.
À FEMTO-ST, l’accent est mis sur la fabrication de surfaces correspondant à des sensations graduées selon un référentiel tactile et leur métrologie objective, qui trouvent matière à corrélation avec l’effecteur, version électronique d’un même processus.

L’expérience se termine sous les meilleurs auspices, puisqu’elle a déjà donné lieu au dépôt d’un projet ANR pour prolonger les recherches. Quant au forum Haptique, le succès de la première édition bisontine, lui promet une programmation tous les deux ans.

Article paru dans le journal "en direct", numéro 251 - Janvier-février 2014.

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