Dégâts et inondations à la suite du passage de Xynthia à Fouras (Charente-Maritime)
Julien Prineau
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La vulnérabilité du littoral en Europe

Des chercheurs du laboratoire Chrono-environnement ont contribué à une analyse historique des évènements climatiques extrêmes sur les côtes européennes. La base de données qu'ils ont constituée a permis d'analyser la fréquence et l'impact des précédentes tempêtes et de faire des préconisations pour reconstruire ces territoires fragilisés par l'urbanisation.

Les 72 millions de personnes qui vivent sur les 150 000 kilomètres de côtes européennes sont potentiellement exposées aux risques de submersion marine. En 2010, la tempête Xynthia a créé la surprise en causant de nombreux dégâts et le décès de 47 personnes. Pourtant, il y avait eu des précédents, notamment en 1953 avec une terrible tempête en mer du Nord qui entraîna la mort de 2 000 personnes aux Pays-Bas, en Angleterre, en Belgique et en Écosse.

Une équipe composée de membres du laboratoire Chrono-environnement et de chercheurs des universités de Cambridge (Royaume-Uni), Ferrara (Italie) et Faro (Portugal) a étudié l'histoire de ces phénomènes. Elle a exploré les archives municipales, les archives de l'État, des écrits privés, la presse et des plans anciens, afin de recueillir des données inédites. Celles-ci ont été rassemblées au sein d'une base de donnée baptisée HISTORISK, créée par le laboratoire Chrono-environnement avec le soutien de la Direction générale de la prévention des risques1. Celle-ci sera consultable en ligne à compter de février 2018.

Abandon du principe de précaution

L'étude a permis de recenser 63 cas de submersion marine sur le littoral depuis le XVIIe siècle, avec une hausse au XXe siècle, notamment en France dans les années 1920-1940 sur la côte atlantique. L'analyse historique montre également que le principe de précaution a été abandonné après la seconde guerre mondiale, avec une urbanisation croissante des côtes. Auparavant, les zones de marais, de dunes et de prairies en bord de mer faisaient office de zones tampon. L'étude des plans et cartes anciens montrent également que les habitats étaient davantage implantés sur des sites élevés et en retrait du trait de côte, et souvent protégés par un réseau dense de bocages. La destruction de ces paysages a accru la vulnérabilité des sociétés littorales. Aujourd'hui, les zones humides et les cordons de dunes ont été remplacés par des villas et complexes touristiques situés au plus près de l'eau, ce qui augmente les risques pour les populations.

Cette étude s'inscrit dans le cadre d'un projet de recherches lancé en 2014 par l'Union européenne et dont l'objectif est de trouver des outils pour développer des stratégies permettant d'améliorer la résilience des zones côtières2. Par « résilience », on entend la capacité de ces territoires à récupérer un fonctionnement normal après une perturbation importante. En se basant sur cette mémoire du risque et des paysages, les chercheurs ont émis des préconisations à l'intention des décideurs afin que soient reconstitués des territoires plus résilients inspirés du passé. « Ces pistes permettront de renforcer les stratégies d'adaptation face à la recrudescence des catastrophes annoncée par les climatologues », ajoute Emmanuel Garnier, historien du climat au laboratoire Chrono-environnement.

Source : article publié sur le site du CNRS

  1. Organe du ministère de l'Écologie.
  2. Resilience-Increasing Strategies for Coasts-Toolkit.

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Laboratoire Chrono-environnement

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