Omar Boulanouar tient une gélatine dans ses mains.
Ludovic Godard
Auteur 
Delphine Gosset

Une avancée dans la compréhension de l’impact des radiations sur l’ADN

Grâce à une technique mise au point par un doctorant du laboratoire Chrono-environnement, une équipe franco-québécoise a montré que l’environnement chimique de l’ADN influence la façon dont il est abîmé par les rayonnements. Cette découverte ouvre des perspectives d’amélioration de la radiothérapie.

Les physico-chimistes du laboratoire chrono-environnement étudient depuis une dizaine d’années la radioactivité et ses effets sur les organismes vivants. Parmi ces chercheurs, Michel Fromm s’intéresse notamment aux électrons dits « de basse énergie », qui sont produits en quantité lors des interactions entre les rayonnements ionisants et la matière. « Comme ces électrons ne voyagent que sur des distances très courtes, on les croyait inoffensifs jusqu’à ce que l’équipe de Léon Sanche, de l’Université de Sherbrooke, prouve le contraire dans les années 2000 » raconte-il. Or, il est très difficile de manipuler ces électrons. Les expériences doivent être menées dans le vide ou avec des couches d’ADN extrêmement fines dans des conditions particulières.

un véritable verrou technologique

C’est là qu’intervient le travail d’Omar Boulanouar qui, pendant sa thèse, a réussi à mettre au point une méthode pour déposer de l’ADN en couches de 5 à 10 nanomètres, à contrôler leur épaisseur et à les récupérer sous forme soluble. Ce faisant, il a levé un véritable verrou technologique qui entravait l’avancée des recherches.

Dans ce type de travaux, on utilise traditionnellement de l’ADN plasmidique, issu de bactéries. De forme circulaire, celui-ci s’ouvre ou se casse sous l’effet des radiations. Omar Boulanouar est parvenu à lui associer, dans ses couches hyper fines, une molécule de diamine, élaborant ainsi un modèle simplifié mimant l’environnement chimique de l’ADN dans le noyau de la cellule. L’objectif était de le soumettre à des électrons de basse énergie pour voir si les dégradations étaient semblables à celles que l’on observe avec de l’ADN pur.

Le laboratoire bisontin ne disposant pas des moyens techniques adéquats, Omar Boulanouar s’est rendu à Sherbrooke pour réaliser ses expériences avec l’équipe québécoise spécialisée dans ce domaine. Deux méthodes classiques ont suffi à évaluer les dégâts induits sur l’ADN. Grâce à l’électrophorèse, on a pu quantifier la quantité de brins intacts, ouverts ou cassés, tandis que la  spectrométrie de masse a permis d’identifier la nature des molécules libérées lors de cette dégradation.

les modèles actuels sont éloignés de la réalité biologique

Quand on le soumet à l’effet d’électrons de basse énergie, l’ADN associé à une diamine n’est ni plus ni moins dégradé que l’ADN pur. En revanche, il l’est différemment. Les fragments émis après que les brins d’ADN aient été brisés n’ont pas la même composition. L’environnement chimique immédiat de l’ADN, dans le noyau de la cellule, influence sa réponse aux rayonnements. Ce résultat laisse à penser que les modèles actuels, élaborés à partir de données obtenues sur de l’ADN seul, sont éloignés de la réalité biologique.

L’équipe a décidé de creuser la question en associant à l’ADN plasmidique des molécules de plus en plus complexes pour se rapprocher progressivement de la composition d’un vrai chromosome. « Si on travaillait d’emblée avec des protéines réelles, les résultats seraient difficiles à interpréter car on ne saurait pas ce qui, dans les espèces chimiques obtenues, provient de l’ADN ou de la protéine…Tandis qu’en procédant pas à pas, on contrôle et on comprend mieux les mécanismes en jeu », précise Michel Fromm.

L’objectif de ces recherches est d’améliorer les modèles sur lesquels se basent les calculs utilisés en radiothérapie, afin d’en limiter les effets secondaires.

Contact

Michel Fromm
03 81 66 65 60
michel.fromm@univ-fcomte.fr

Christophe Mavon
03 81 66 65 08
christophe.mavon@univ-fcomte.fr

Laboratoire chrono-environnement
http://chrono-environnement.univ-fcomte.fr

Portrait de Michel Fromm devant son ordinateur
Omar Boulanouar pose en blouse blanche devant une hotte aspirante.
pipette et morceau de graphite
Mounir Souici devant une machine à rayons X mous

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