Illustration Actu Un prix pour des bulles d'émotions
Élodie Crozier
Auteur 
Alizée MOSCONI

Un prix pour des bulles d'émotions

Et si l’on vous offrait la possibilité d’observer vos émotions sur un écran ? Mieux, d’apprendre à les contrôler ! Loin d’être de la science-fiction, ce projet récemment mis au point par le chercheur en neurosciences Damien Gabriel et l’artiste numérique Guillaume Bertrand, se voit récompensé d’un accessit du prix AEMD Marina Picasso de la fondation suisse éponyme. Une belle réussite pour ce dispositif né en 2018, lors des Appels à projets artistiques (APA) lancés par l’Université de Franche-Comté et la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC).

Insomnies, stress, dépression… « Plus d’un tiers de la population souffre de troubles mentaux aujourd’hui », résume Damien Gabriel, ingénieur de recherche au Laboratoire de Neurosciences Intégratives et Cliniques de l'Université de Franche-Comté, à Besançon. C’est en partant de ce constat que le scientifique s’est lancé un défi : permettre aux patients d’apprendre à mieux gérer leurs émotions. Une alternative pour éviter les traitements médicamenteux.

En 2018, dans le cadre de l’Appel à projets artistiques de l’Université de Franche-Comté et de la DRAC, le chercheur s’est associé à Guillaume Bertrand, un artiste numérique. Ils ont ensemble mis au point un dispositif finalisé en septembre de la même année. L’appareil ? « Nous déposons sur la tête du patient un casque électroencéphalographe qui mesure son activité cérébrale », explique Damien Gabriel. « Puis, le résultat s’affiche sur un écran placé face au sujet. »

Des pois de stress et de tristesse

Apparaissent alors une multitude de petites bulles vertes qui s’agitent ici et là sur un écran circulaire. Elles se dirigent en fonction de deux axes, pour finalement révéler l’état émotionnel du patient : plus l’intensité de l’émotion ressentie est forte, plus les particules se déplacent en haut de l’écran; moins l’émotion est positive, plus les billes se positionnent vers la gauche. Autrement dit, un patient triste observera ses bulles d’émotions se concentrer en bas à gauche de l’écran.

Damien Gabriel a présenté son détecteur d’émotion au grand public lors de l’exposition Vivo ! qui s’est tenue en octobre dernier sur le campus de la Bouloie de l’Université de Franche-Comté, à Besançon. « Lorsque nous avons testé notre dispositif sur les visiteurs, l’écran indiquait le plus souvent un état de stress chez les participants, car ils appréhendaient sûrement de voir leurs émotions dévoilées devant une foule de curieux. » Impossible donc de bluffer ! « Pour que le test fonctionne, il vaut mieux s’isoler dans un lieu calme », précise le chercheur. « Quand nous avons pensé ce projet, nous souhaitions avant tout offrir une solution aux patients dépressifs, en leur permettant ainsi de trouver eux-mêmes des astuces pour faire évoluer leur bulles d’émotions sur l’écran, au fil des séances, et atteindre progressivement un état de bonheur. L’exposition Vivo ! nous a fait réaliser que ce dispositif pouvait également être utile à des jeunes en crise d’adolescence, à des sportifs ou même, au travail, pour manager au mieux ses équipes ! » Et il ne reste plus qu’à faire valider l’invention sur les patients...

Mêler l'art à la science

En avril dernier, le dispositif conçu par Damien Gabriel et Guillaume Bertrand a remporté un accessit du prix AEMD Marina Picasso. « Chaque année, les Appels à projets artistiques lancés par l’Université de Franche-Comté et la DRAC concernent une centaine d’étudiants et une quinzaine d’artistes, et font l’objet d’une dizaine de restitutions publiques », rappelle Elodie Méreau, chargée de projets culturels à l’Université de Franche-Comté. « C’est une belle opportunité pour les scientifiques de mêler l’art à leur recherche », conclut-elle. 

Contact

Laboratoire de neurosciences intégratives et cliniques

Dispositif inventé par Damien Gabriel et Guillaume Bertrand.
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