Gros plan sur un flacon de médicament et une pipette, avec en arrière plan une plaquette de médicaments.
Ludovic Godard
Auteur 
Catherine Tondu

Lutter contre l’inflammation chronique

Porteur de grands espoirs dans le traitement des maladies inflammatoires, le médicament SuperMApo® a apporté les preuves de son efficacité in vitro et chez le petit animal. Ce médicament né au laboratoire Interaction hôte-greffon-tumeur & ingénierie cellulaire et génique poursuit son développement en vue d’un futur transfert vers l’industrie pharmaceutique. La création de la start-up MED’INN’ Pharma représente une étape décisive dans ce parcours exemplaire.

Rééduquer le système immunitaire afin d’éviter que, par excès de zèle, il ne se dérègle et finisse par devenir contreproductif, tel est le concept de SuperMApo®. Un médicament pas comme les autres puisqu’au lieu de cibler une pathologie, il attaque le problème à la source pour empêcher la survenue de la maladie, ici l’inflammation chronique.

L’innovation réside dans la rééducation du système immunitaire plutôt que de cibler, neutraliser et détruire les acteurs dérégulés. Les cellules du système immunitaire provoquent une inflammation naturelle en réponse à une agression externe, par exemple lors d’une infection. A l’issue de cette phase inflammatoire ayant permis l’élimination de « l’agresseur », un signal indique aux cellules de changer de rôle pour se consacrer à l’arrêt de la réponse inflammatoire puis à la reconstruction et la guérison des tissus. Parfois ce signal n’est pas « entendu » par les cellules, qui poursuivent obstinément leur tâche première, provoquant alors une inflammation chronique.

Sylvain Perruche est chercheur INSERM au laboratoire Interaction hôte-greffon-tumeur & ingénierie cellulaire et génique. Il est le père du SuperMApo®, dont il explique le mode d’action. « Nous avons recréé in vitro le processus que suit normalement le système immunitaire afin d’arrêter naturellement la réponse inflammatoire. Nous avons isolé les facteurs qui permettent aux cellules de stopper cette réponse et d’initier la réparation des tissus au moment opportun. Ce sont ces facteurs qui constituent le SuperMApo® ; ils seront ainsi administrés aux patients chez qui, pour une raison ou une autre, ils ne permettent plus l’arrêt naturel de la réponse inflammatoire. »

Un formidable espoir pour les personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde, de fibrose pulmonaire ou de la maladie de Crohn, les trois pathologies auxquelles s’adressera dans un premier temps le médicament. Et une voie totalement novatrice dans le domaine pharmaceutique : le SuperMApo® entre dans le champ de la « pharmacologie résolutive », qui n’en est qu’à de prometteurs balbutiements.

Estampillé « médicament biologique complexe »

Après la présentation officielle du SuperMApo® à Londres, l’agence européenne du médicament a proposé que ce produit hors normes entrerait dans la catégorie des « médicaments biologiques complexes », et qu’il serait régi par des recommandations réglementaires spécifiques, issues des lois concernant les domaines du médicament, des dérivés du sang et des médicaments de thérapie innovante (thérapie cellulaire), auxquels il est apparenté.

Cette étape capitale de discussion avec la haute instance européenne donne le feu vert à la création d’une start-up chargée du développement du SuperMApo®. MED’INN’ Pharma verra le jour dans les prochaines semaines. Protocole de fabrication à verrouiller avec des experts de la réglementation du médicament, essais précliniques réglementaires, essais cliniques chez l’homme pour tester la toxicité puis l’efficacité du produit : cinq ans et plus de sept millions d’euros seront nécessaires avant de passer éventuellement la main à l’industrie pharmaceutique, pour qu’elle finalise l’évaluation clinique et commercialise le médicament.

Autour de son président fondateur, MED’INN’ Pharma accueille deux associés, Fabrice Heitzman, expert en industrie pharmaceutique, et Christophe Clément, spécialiste des réglementations précliniques et cliniques, et deux salariés, les docteurs Francis Bonnefoy et Mélanie Couturier, tous deux immunologistes. La start-up est pour le moment hébergée à Besançon dans les locaux de l’Établissement français du sang. Le SuperMApo®, ou Supernatant from Macrophage & Apoptotic Cells culture, est protégé par un brevet en Europe et en Amérique du Nord. Le projet reçoit depuis ses débuts un fort soutien de la Région Franche-Comté, de Bpifrance, de l’EFS et de l’université de Franche-Comté.

Article publié dans le numéro 265 de juillet 2016 du journal en direct.

Contact

Sylvain Perruche
03 81 61 56 15
sylvain.perruche@inserm.fr

Laboratoire Interactions hôte-greffon-tumeur et ingénierie cellulaire et génique