Les deux doctorants en train de numériser une poterie
Ludovic Godard
Auteur 

Découvrir l’histoire de céramiques romaines à l’aide de la numérisation 3D

Deux doctorants de l’université de Franche-Comté ont participé à un projet de recherche qui vise à révéler le « trésor caché de Rome ». Grâce au soutien de la Maison des sciences de l’homme et de l’environnement (MSHE), ils ont pu mener aux États-Unis une campagne de numérisation 3D sur un lot de céramiques antiques.

Début 2016, Damien Vurpillot et Valérie Taillandier, tous deux doctorants en archéologie, se sont envolés pour les États-Unis avec deux scanners 3D fournis par la plateforme technologique de la MSHE Claude-Nicolas Ledoux afin d’apporter leur contribution scientifique au projet de recherche « Hidden Treasure of Rome ». Ce projet qui a démarré il y a plusieurs années est le fruit d’une collaboration entre l'université du Missouri, la Ville de Rome et ses musées du Capitole. Il s'agit d'explorer les imposantes réserves de ces musées où plusieurs dizaines de milliers d'artefacts issus de nécropoles sont entreposés sans toutefois jamais avoir été présentés au public.

Bien souvent, ces objets sont issus de découvertes anciennes et nombre d'entre eux ne bénéficient pas d'un contexte archéologique précis. Or l’archéologie dispose aujourd’hui de plusieurs techniques de pointe permettant d’examiner ces collections. Une sélection de céramiques, issues de dépôts funéraires datés entre le Ve et le Ier siècle av. J.-C. et découverts à la fin du XVIIIe siècle lors du réaménagement urbain de Rome, a ainsi fait l'objet d'analyses chimiques1. Une soixantaine d'objets ont ainsi été étudiés par le laboratoire d'archéométrie du Missouri University Research Reactor, qui fait figure de pionnier pour ce type d'étude depuis bientôt 30 ans. « Les résultats sont encourageants, mais le nombre réduit d’artefacts étudiés et leur lieu d'enfouissement dans une zone restreinte de Rome ne permettent pas d'émettre d’hypothèses très avancées », expliquent Damien Vurpillot et Valérie Taillandier.

Numériser les céramiques pour mieux les étudier

En complément, des analyses de surface ont été pratiquées. Deux approches ont été privilégiées : le traitement RTI (Reflectance Transformation Imaging) et la numérisation 3D. L'intérêt de cette seconde méthode porte autant sur l'analyse d'infimes marques d'utilisation des objets que sur leur valorisation par l'image numérique en 3D, car ces céramiques d'époque républicaine ont été pour la plupart entièrement préservées.

« Les deux scanners 3D de la MSHE ont constitué un atout indéniable pour numériser ces artefacts à haute résolution malgré des contraintes », commentent les doctorants. En effet, la plupart des céramiques sont de petite taille et recouvertes d'un engobe noir (couche à base d’argile) très brillant qui se révèle problématique pour la plupart des scanners 3D du marché. Grâce au travail effectué par les deux doctorants de l’UFC2, les chercheurs américains disposent à présent d’éléments supplémentaires pour tenter de « comprendre quelle vie ont eu ces objets avant de se retrouver dans la tombe », explique Valérie Taillandier. La qualité des modèles numériques obtenus permet par exemple d'observer la succession des marques dans le temps, avec des recoupements assez précis pour qu'on puisse en déterminer la chronologie relative.

Les premiers essais très concluants de cette campagne de numérisation vont permettre à la MSHE et à l'université de Franche-Comté de poursuivre leur implication dans ce projet international qui vise à multiplier les analyses sur d'autres lots des réserves des musées capitolins de Rome dès l'an prochain.

  1. Les techniques utilisées sont l’activation neutronique et la spectrométrie de fluorescence des rayons X. L'objectif de ces méthodes est d'identifier un certain nombre d'éléments chimiques qui forment des profils permettant de constituer des groupes de matériel, et parfois d'en identifier la provenance.
  2. Valérie Taillandier et Damien Vurpillot (rattachés au laboratoire Chrono-environnement) faisaient partie d’une équipe pluridisciplinaire composée de Laura Banducci, spécialiste de l'étude des marques sur le mobilier céramique (Carlton University, Ottawa), Rachel Opitz et Kyle Urquhart, spécialistes des acquisitions 3D (Center for Advanced Spatial Technologies, University of Arkansas), ainsi que des deux porteurs de projets Marcello Mogetta (Roman Art and Archaeology, Missouri University) et Alex W. Barke (directeur du musée d'Art et d'Archéologie de Columbia).

Contact

Maison des sciences de l'homme et de l'environnement (MSHE) Claude Nicolas Ledoux

Résultat de la numérisation 3D d'une céramique

Articles relatifs